Le Caire, publié le 30 janvier 2008 – Un tribunal administratif de première instance a rendu hier son verdict dans deux affaires concernant la pratique du gouvernement égyptien en matière d’appartenance religieuse et de documents d’identité.
Le tribunal de justice administrative du Caire a reconnu la validité des arguments avancés dans ces deux affaires concernant des bahá’ís qui cherchaient à rétablir dans leurs droits de citoyens en demandant de pouvoir laisser en blanc la case relative à l’affiliation religieuse dans les documents officiels.
« Etant donné la place que prennent les cas de liberté religieuse dans les questions des droits de l’Homme au Moyen-Orient, le monde devrait se réjouir du verdict rendu dans ces deux affaires aujourd’hui », a déclaré Bani Dugal, représentante principale de la Communauté internationale bahá’íe aux Nations Unies.
« Nous nous réjouissons de cette bonne nouvelle pour nos corréligionnaires égyptiens en espérant que décision soit exécutée par le Gouvernement égyptien et que cette approche soit confirmée par le Conseil d’Etat. » ajoute Brenda Abrar, porte-parole des bahá’ís de France.
Selon Madame Dugal : « Le compromis avancé par les bahá’ís dans ces deux affaires ouvre la porte à une façon de composer avec une directive gouvernementale, manifestement incompatible aussi bien avec la loi internationale qu’avec le bon sens. »
« Nous espérons maintenant que le gouvernement mettra rapidement à exécution la décision du tribunal et aux bahá’ís de jouir, à nouveau, de tous leurs droits de citoyens auxquels ils peuvent légitimement prétendre. » »
Les verdicts de ce jour concernaient deux affaires, introduites par des bahá’ís, au sujet de la façon dont il fallait les identifier sur les documents officiels.
Le premier cas concernait un procès intenté par le père de jumeaux qui voulait obtenir un certificat de naissance correct pour ses enfants. Le second était celui d’un jeune étudiant qui avait besoin d’une carte d’identité nationale pour se réinscrire à l’université.
Le gouvernement exige que tous les documents d’identité mentionnent l’appartenance religieuse tout en restreignant le choix aux trois religions officiellement reconnues : l’islam, le christianisme et le judaïsme. Pour cette raison, les bahá’ís n’arrivaient pas à obtenir de documents d’identité puisqu’ils refusent de mentir au sujet de leur affiliation religieuse.
Sans carte d’identité ou certificat de naissance, comme dans le cas des jumeaux, les bahá’ís et d’autres personnes d’autres confessions ou non croyantes, pris dans les exigences contradictoires de la loi, se retrouvaient privés d’un grand nombre de droits accordés aux citoyens, comme l’accès à l’emploi, à l’éducation ou encore aux services médicaux et financiers.
Ces problèmes furent mis en lumière dans un rapport que Human Rights Watch et l’Initiative égyptienne pour les droits personnels (EIPR), basée au Caire, ont publié en novembre dernier.
Ce rapport mentionne : « Selon la loi, les employeurs tant publics que privés ne peuvent engager une personne sans carte d’identité et les institutions académiques exigent ce document à l’inscription. Pour obtenir la permission de se marier ou un passeport, il faut un certificat de naissance ; l’héritage, la pension et les avantages consécutifs au décès d’un parent requièrent un certificat de décès. Le Ministère de la santé a même refusé de procéder à la vaccination de certains enfants bahá’ís parce que le Ministère de l’intérieur ne leur délivrait pas de certificat de naissance qui mentionnaient correctement leur religion bahá’íe. »
La délivrance de certificats de naissance est au cœur de la première affaire qui concerne les jumeaux de 14 ans Imad et Nancy Rauf Hindi. Leur père, Rauf Hindi, avait obtenu lors de la naissance de ses enfants des certificats qui reconnaissaient leur affiliation bahá’íe.
Mais de nouvelles dispositions impliquent la production informatique des certificats et le programme ne permet pas d’autre affiliation religieuse que celle des trois religions officiellement reconnues. Sans certificat de naissance, les enfants ne peuvent s’inscrire à l’école en Egypte.
La deuxième affaire avait été introduite par l’EIPR en février 2007 au nom de Hussein Hosni Bakhit Abdel-Massih, un jeune homme de 18 ans qui avait été suspendu de l’Institut supérieur d’assistance sociale de l’université du Canal de Suez en janvier 2006, du fait qu’il ne pouvait obtenir de carte d’identité, refusant de s’identifier faussement comme musulman, chrétien ou juif.
Dans les deux cas, les avocats représentant les bahá’ís ont fait clairement savoir qu’ils voulaient bien s’accommoder de cartes ou de documents où le champ relatif à l’affiliation religieuse serait laissé vide ou éventuellement rempli avec la mention : « autre ».
La solution proposée ici distingue ces deux affaires de celle que le Conseil d’Etat égyptien avait rejetée l’an dernier. Dans sa décision, le Conseil d’Etat avait annulé une décision de première instance qui donnait aux bahá’ís le droit d’être correctement identifiés sur les documents officiels.