Haïfa, Israël, publié le 13 septembre 2010 – Il y a cent ans, ‘Abdu’l-Bahá, le fils aîné de Bahá’u’lláh et son successeur désigné comme dirigeant de la foi bahá’íe, a entamé une série de voyages qui, pendant plus de trois ans, l’ont conduit de Terre sainte au delta du Nil, de la côte pacifique d’Amérique du Nord jusqu’aux bords du Danube.
En dépit de son âge avancé, ‘Abdu’l-Bahá s’est mis en route, en août 1910, avec l’objectif de présenter les enseignements de Bahá’u’lláh concernant l’émergence d’une nouvelle ère de paix et d’unité, aux personnes les plus importantes comme aux plus modestes. Ces voyages historiques ont propulsé une religion naissante vers un statut de religion mondiale.
« Il avait soixante-six ans, a écrit la Maison universelle de justice dans un message daté du 29 août destiné à marquer le centenaire, exilé depuis son enfance, sans aucune formation scolaire, prisonnier pendant quarante ans, en mauvaise santé et ne connaissant rien des coutumes et langues des pays occidentaux. Et pourtant, il s’est levé, sans se soucier du moindre confort et en dépit des risques encourus … ».
« Le début des voyages de ‘Abdu’l-Bahá vers l’Occident a marqué la fin des entraves à la diffusion de la cause de Bahá’u’lláh immobilisée, pendant plus d’un demi-siècle, par les armées de l’hostilité et de l’oppression ».
Avancées décisives dans de nouvelles cultures
Suite à la révolution des Jeunes Turcs de 1908, tous les prisonniers politiques et religieux de l’Empire ottoman – y compris ‘Abdu’l-Bahá et sa famille – ont été libérés. Il a commencé alors à planifier la diffusion des enseignements bahá’ís dans des régions au-delà du Moyen-Orient. Deux ans plus tard, il a quitté la Terre sainte et est allé, en premier lieu, en l’Égypte où il a séjourné pendant une année.
Puis, en août 1911, ‘Abdu’l-Bahá a embarqué pour l’Europe, séjournant un mois à Londres et deux mois à Paris. Il est rentré en Égypte pour l’hiver, puis a entamé, en mars 1912, une longue tournée de huit mois en Amérique du Nord, suivie d’une seconde visite à Londres et à Paris, ainsi que d’une série de voyages en Autriche, en Allemagne, en Hongrie et en Écosse.
« Depuis le décès de Bahá’u’lláh, l’expansion de la foi bahá’íe en Amérique du Nord et en Europe avait connu des développements très importants, explique Moojan Momen, historien établi au Royaume-Uni, mais ces communautés comptaient relativement peu de membres. Ainsi, lors de ses visites, ‘Abdu’l-Bahá a non seulement diffusé les enseignements bahá’ís, mais a également consolidé la percée de la religion au sein de nouvelles cultures ».
Au cours de sa toute première causerie – prononcée au City Temple de Londres le 10 septembre 1911 – ‘Abdu’l-Bahá a proclamé à l’assemblée : « Le don divin à cette époque éclairée est la reconnaissance de l’unité du genre humain et de l’unité fondamentale de la religion ».
« Encore et encore, il a insisté sur la nécessité d’entente entre les peuples, d’unification des religions et de la paix mondiale », explique Jan Jasion, écrivain établi à Paris, qui mène des recherches concernant les voyages de ‘Abdu’l-Bahá en Europe. « Il souhaitait, pour chacun, une réconciliation avec Dieu, une compréhension de la réalité de la religion et la disparition des superstitions ».
« ‘Abdu’l-Bahá pouvait également participer à des discussions sur des thèmes étrangers à son expérience moyenne-orientale. Comme, par exemple, le grand danger du racisme, la relation entre le capital et le travail ou les conflits entre ouvriers et employeurs, la grande guerre imminente et le fédéralisme comme solution aux problèmes des États », fait remarquer Firuz Kazemzadeh, professeur émérite en histoire de l’université de Yale.
Infatigablement, pendant trois ans, ‘Abdu’l-Bahá s’est adressé à des milliers de personnes – y compris des hommes d’Église, des journalistes, des académiciens, des diplomates, des philosophes, des suffragettes et des réformateurs sociaux. Il a aussi – peut-être l’action la plus importante pour lui – rencontré et répondu aux besoins des pauvres.
M. David Starr Jordan, scientifique américain et administrateur d’université, a été parmi ceux qui furent les plus profondément impressionnés par sa personnalité. Il a exprimé une pensée des plus connues : « ‘Abdu’l-Bahá unira, sans l’ombre d’un doute, l’Orient et l’Occident, car il arpente les voies mystiques avec des pieds pragmatiques ».
M. Cheyne d’Oxford, célèbre théologien, présentait ‘Abdu’l-Bahá comme l’“ ambassadeur de l’humanité”.
« Ce qui est surprenant, c’est qu’au moment où ‘Abdu’l-Bahá exprimait de nombreux éloges envers les penseurs progressistes, son jugement vis-à-vis de l’échec de leurs propres idéaux était également clairvoyant et inflexible, remarque Kenneth E. Bowers, actuel secrétaire de l’Assemblée spirituelle nationale des bahá’ís des États-Unis. Il plaçait l’individu face au défi de s’élever au-dessus de sa compréhension de la réalité, à un niveau supérieur de réalisation – spirituelle autant que sociale ».
« D’autres aspects de la personnalité de ‘Abdu’l-Bahá ont réjoui les cœurs de ceux qu’il rencontrait.
Il s’est remarquablement comporté avec aisance dans des cultures qui lui étaient totalement étrangères. Je pense que l’une des choses dont nous devrions nous souvenir à son sujet – et que nous oublions parfois en tant que caractéristique d’une figure ‘spirituelle’ – est qu’il était quelqu’un plein d’humour et de charme ».
“Un événement religieux de grande importance”
Alors que les voyages de ‘Abdu’l-Bahá se terminaient, la communauté bahá’íe naissante avait acquis une vision plus large de sa Foi et des citoyens appartenant à neuf pays différents, sur trois continents, avaient été informés des enseignements bahá’ís pour la première fois.
« Au commencement du ministère de ‘Abdu’l-Bahá, la foi bahá’íe était un mouvement religieux relativement peu connu. Peu d’informations précises à son sujet existaient, explique Moojan Momen. À la fin de sa vie, non seulement en Europe et en Amérique du Nord mais dans le monde entier – en Asie, dans le Pacifique, en Australie, en Afrique du Sud – un grand nombre de personnes connaissaient la Foi et en avaient une impression positive ».
« Ses voyages furent certainement un événement religieux de très grande importance pour le 20ème siècle, ajoute M. Momen. Ils ont produit le même genre d’effet que les voyages de St Paul, c’est-à-dire un impact considérable sur la propagation du christianisme».
Kenneth E. Bowers pense qu’il est impossible de concevoir la communauté bahá’íe américaine d’aujourd’hui, par exemple, sans prendre en compte la visite de ‘Abdu’l-Bahá. « Par sa vie et ses paroles, il était la personnification des enseignements de Bahá’u’lláh. Il a poussé la première poignée de bahá’ís a, non seulement répandre leur Foi mais, tout aussi important, à faire face aux épreuves. D’une manière pleine de tact, d’affection et de sagesse, il a indiqué l’exemple à suivre ».
Grâce aux voyages de ‘Abdu’l-Bahá, la communauté bahá’íe a commencé à propager davantage ses idées qui connurent un succès populaire renforcé. « C’est en cela que réside le véritable impact de ses visites – dans la capacité de la communauté qu’il a éduquée à poursuivre, pendant toutes ces années, ce qu’il leur a enseigné», poursuit Firuz Kazemzadeh.
Dans sa lettre, la Maison universelle de justice invite la communauté bahá’íe du monde entier à réfléchir non seulement à ce que ‘Abdu’l-Bahá a réalisé et a mis en mouvement, mais aussi au travail qui subsiste.
Les paroles prononcées et les actions réalisées au cours de ses voyages, écrit la Maison universelle de justice, nous offrent une abondante source d’inspiration et une multitude d’idées nous permettant de faire face aux défis du temps présent.